Torture des prisonniers de guerre et des détenus civils ukrainiens

C'est aujourd'hui la Journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture. Voici les données que nous avons recueillies sur les actes de torture commis par les Russes en 2022 et 2023.
Yevhen Zakharov 26 Juin 2023UA DE EN ES FR IT RU

Salle de torture à Izioum, le 19 septembre 2022. © Oleksandra Novosel / Suspilne

Depuis le début de l’invasion à grande échelle, la torture par les Russes des prisonniers de guerre et des prisonniers civils ukrainiens dans les territoires occupés est devenue un phénomène de masse. Presque toutes les personnes détenues ont été soumises à la torture : les collaborateurs du Groupe de défense des droits humains de Kharkiv, qui vient en aide aux victimes de guerre, n’ont rien vu d’autre. Des personnes âgées, des femmes et même des enfants sont parmi les victimes de torture. Toutefois, cela ne peut être constaté qu’une fois que les personnes ont été libérées et sont de retour en territoire contrôlé par le gouvernement ukrainien, ce qui concerne un nombre de cas plutôt restreint. Dans la base de données de l’initiative Tribunal for Putin (T4P), 538 cas de torture sont documentés (dont 12 concernant des mineurs), tandis que dans cette même base, le nombre de prisonniers civils, détenus illégalement ou disparus, est d’environ 5000. Mais même ce chiffre est nettement inférieur au nombre réel de prisonniers civils, qui s’élève à près de 20000. Il est extrêmement difficile de savoir où se trouvent les prisonniers.

C’est dans la région de Kharkiv que le plus grand nombre de cas de torture ont été répertoriés dans la base de données du T4P, avec 278 cas, dont 6 enfants. Viennent ensuite la région de Kyiv, avec 72 cas dont 2 enfants, la région de Tchernihiv, avec 58 cas dont 3 enfants, les régions de Kherson et Donetsk, avec 32 cas chacune, la région de Zaporijjia, avec 23 cas dont 1 enfant, la région de Soumy, avec 18 cas, la région de Mykolaïv, avec 16 cas, et enfin la région de Luhansk, avec 6 cas.

Un téléphone TA-57 utilisé comme appareil de torture au courant électrique. Photo tirée de la page Facebook du bureau du procureur régional de Kharkiv

Dans les territoires occupés, le plus grand risque d’être capturé et soumis à la torture est encouru par les participants aux combats entre 2014 et 2021, les gardes-frontières, les secouristes, les autres employés de l’État et des collectivités locales, les membres des conseils locaux, ainsi que les personnes connues dans leur commune : entrepreneurs, personnalités publiques, journalistes et même prêtres. Le plus souvent, ils sont d’abord détenus dans des locaux inadaptés à la détention, ce qui en soi peut être qualifié de torture par les conditions de détention. Dans la région de Kharkiv, après la libération, 25 lieux de torture de ce type ont été découverts à Izioum, Koupiansk, Balaklia, Vovtchansk et ailleurs. Une description de certaines de ces geôles et des témoignages de victimes sont disponibles sur le site internet du Groupe de défense des droits humains de Kharkiv (GDHK).

Les avocats du GDHK défendent les intérêts de 90 victimes de torture, dont 13 femmes et 77 hommes, y compris un mineur. Une vingtaine de victimes de torture sont âgées de 60 ans ou plus. 19 victimes ont été agressées sexuellement : 12 femmes, six hommes et un mineur. Grâce à la recherche et à l’interrogation de témoins, les avocats du GDHK ont réussi à identifier neuf bourreaux qui ont été poursuivis en justice. Il travaillent pour cela en étroite collaboration avec le bureau du procureur et les services d’enquête du Service de Sécurité d’Ukraine dans les régions de Kharkiv et de Kyiv.

Outre l’assistance juridique, le GDHK fournit également une assistance psychologique et humanitaire et, dans certains cas, une assistance médicale aux victimes de torture. Nous contribuons également à la conduite d’examens médico-légaux et les psychologues du GDHK préparent des Amicus Curiae (avis d’expert) pour le bureau du procureur sur la base du Protocole d’Istanbul dans sa version actualisée de 2022, sur l’état psychologique des victimes de torture.

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